Parmi toutes les missions des URSSAF (ou de la MSA), il est deux qui retiennent l’attention : faire rentrer les cotisations et contributions afin de financer le système de protection sociale et lutter contre le travail dissimulé. Or, ces missions sont parfois contrecarrées par l’insolvabilité des cotisants. C’est dans ce contexte que se développe depuis quelques années une pratique consistant pour les organismes de recouvrement à rechercher la solidarité financière des donneurs d’ordre en cas de manquements de leur part quant à l’attestation de vigilance. Rappelons que cette attestation est délivrée par les organismes de recouvrement dès lors que la personne est à jour de ses obligations de déclaration et de paiement. Pratiquement, le donneur d’ordre est tenu de vérifier, lors de la conclusion d’un contrat portant sur une obligation d’une certaine valeur (5 000 € HT, C trav art R 8222-1), puis tous les 6 mois jusqu’à la fin de son exécution, que son cocontractant s’acquitte, entre autres obligations, de celles relatives à la déclaration et au paiement des cotisations à l’égard de l’URSSAF (CSS art L 243-15, C trav arts L 8222-1 et D 8222-5). À défaut de procéder à ces vérifications et si le sous-traitant a eu recours au travail dissimulé, le donneur d’ordre peut être poursuivi pénalement et devoir régler solidairement les cotisations sociales du sous-traitant. Il peut également perdre le bénéfice des exonérations et réductions de cotisations applicables à ses salariés sur toute la période où le délit de travail dissimulé du sous-traitant aura été constaté (V. C trav art L 8222-2, CSS art L 133-4-5). Finalement, ce qui est reproché ici, c’est que le cotisant n’a pas mis en œuvre les moyens qui auraient permis d’identifier l’infraction.Aujourd’hui, la pratique montre que peu d’entreprises respectent cette obligation, soit parce qu’elles l’ignorent soit parce que ce formalisme leur prendrait trop de temps. Tout le monde a encore en tête la situation de quatre associations du Nord (dont la vocation est d’aider les plus démunis) qui s’étaient vu signifier des redressements dont le montant dépassait le million d’euros suite à non-respect de l’obligation de vigilance…On se souvient que le ministre de l’Action et des Comptes publics (le nordiste Gérald Darmanin) avait alors décidé en novembre 2019 de faire application de « l’esprit du droit à l’erreur » (sans que l’on voie le rapport entre les deux phénomènes…) et d’annuler le redressement !

Reste que pour les autres entreprises (et surtout les plus petites), peu habituées à ces contraintes administratives, le problème reste entier…

En outre, quelles sont les possibilités de recours des donneurs d’ordre ?

Les dernières jurisprudences laissent le juriste pantois :

▪ L’URSSAF n’a pas l’obligation de faire parvenir au donneur d’ordres le procès-verbal de constat du travail dissimulé (Cass civ.2°. 28 mai 2020. pourvois n°19-14862 et 19-14863)

▪ il appartient au donneur d’ordres de vérifier l’authenticité de l’attestation transmise par son sous-traitant (Paris, Pôle 6 – Chambre 13, 26 juin 2020, RG n° 18/02874)

Ciel ! Veut-on désormais transformer les cotisants en détectives, en inspecteur Derrick ou lieutenant Columbo ? A moins que l’on cherche tout simplement à interdire toute contestation du chef d’entreprise. Mais là, il faudrait clairement le dire….sachant que de tels procédés ne peuvent contribuer à améliorer les relations entre les URSSAF et les entreprises.

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